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« Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal, fatigués de porter leur misère hautaine », les premiers mots du poème les Conquérants de José Maria de Heredia expriment la soif de découverte qui s'est emparée d'une grande partie des créateurs, tant écrivains que peintres, à l'étroit dans la société matérialiste de la fin du dix-neuvième siècle. Avec Jeux d'eau, les personnages de fantaisie de Bonnard appareillent pour un de ces mondes à découvrir, et nul ne peut dire si les flots les mèneront vers un nouveau pays ou vers une mythique Cythère. Avec Vairumati, Paul Gauguin, qui est parti seul à la rencontre de la spiritualité de contrées éloignées, transporte les spectateurs vers les lointains qu'il a découverts, installant devant leurs yeux des personnages et des éléments de décor qui tiennent tout à la fois du réel et de l'imaginaire. Vairumati, la jeune femme, au premier plan, est l'incarnation d'une semi-divinité dont le rôle fut fondamental dans l'histoire mythique des îles Marquises. Elle est installée sur une sorte de trône dont le dossier, qui nimbe sa tête, est décoré de motifs inspirés des reliefs de Borobudur, dont on reconnaît d'autres éléments dans les personnages de l'angle supérieur droit. A ces figures s'oppose, en bas à gauche, un étrange oiseau blanc tenant dans ses serres un lézard, qui représente, au dire du peintre, « la futilité des vaines paroles ». |
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