C’est alors qu’il fait l’acquisition en 1759 à proximité de Genève, à Ferney, d’un château entouré de sept hectares dans lequel il s’installe avec sa nièce devenue sa compagne, Madame Denis (1712-1790). C’est la période la plus fructueuse de sa vie. Il s’adonne au théâtre. En 1763 parait le Traité sur la tolérance dans lequel il dénonce les erreurs judiciaires notamment à l’occasion de la condamnation à mort de Jean Calas accusé d’avoir tué son fils alors que ce dernier s’était pendu. Profitant de sa popularité, l’écrivain se bat avec acharnement pour obtenir sa réhabilitation qu’il finit par obtenir en 1765. Il rédige à l’âge de soixante-seize ans de 1770 à 1772 une œuvre très importante qui constitue la somme de sa pensée les Questions sur l’Encyclopédie qui comprend neuf volumes et quatre cent quarante articles.

Il se révèle également le plus grand épistolier de tous les temps avec 21.000 lettres connues dont 15.000 lettres écrites à Ferney ! A l’âge de quatre-vingt-quatre ans, en 1778, il décide de rejoindre Paris pour la représentation d’Irène, sa dernière tragédie à la Comédie française. A cette occasion, il est porté en triomphe par la foule. Le 30 mars de la même année, il reçoit l’hommage de l’Académie française. Atteint par la maladie, il meurt deux mois après chez son ami le marquis de Villette. Afin d’éviter la fosse commune réservée aux gens de théâtre, sa famille et ses amis l’enterrent discrètement et provisoirement en Champagne. Grâce au marquis de Villette, il sera transféré à Paris au Panthéon en 1791 dont il est l’hôte le plus ancien. Peu après sa mort, madame Denis, son héritière, vend le château au marquis de Villette.

Lors de son installation à Ferney à l’âge de soixante-cinq ans, Voltaire se comporte en véritable seigneur. Il entreprend de créer une ville idéale en favorisant l’artisanat notamment l’horlogerie et la soierie. A cet effet, il crée des ateliers ainsi qu’une fabrique de céramiques et fait également bâtir une centaine de logements. Devenu riche, il reconstruit entièrement en 1762 le château et l’agrandit trois ans plus tard de deux ailes pour pouvoir accueillir ses nombreux visiteurs. Le bâtiment de style néoclassique à la façade de couleur rose est composé d’un corps principal et d’un avant-corps comprenant des colonnes doriques encadrant la porte principale. Remarquez sur le fronton triangulaire les armoiries de Voltaire et de madame Denis. Sur la gauche du bâtiment, on aperçoit une véranda qui a été rajoutée en 1892.

Dans le vestibule remanié au XIXe siècle, deux sculptures encadrent la porte menant au salon ; l’une de Voltaire et l’autre de Rousseau, autre célèbre philosophe du XVIIIe siècle, tous deux tenant un livre à la main. Bien que ces deux hommes ne s’appréciaient guère, ils sont considérés comme les précurseurs de la Révolution française.
A gauche, l’antichambre, autrefois salle d’attente pour ceux qui rendaient visite au maitre des lieux, a retrouvé sa couleur bleu ciel d’origine. Elle montre des gravures représentant le château à différentes étapes de son aménagement. Admirez le remarquable buste de Voltaire (1775-1776) par François Marie Poncet (1703-1786). On y trouve une montre ronde (1770) en or, argent et émail peint, fabriquée à Ferney qui rappelle le rôle du philosophe dans l’implantation d’ateliers d’horlogerie.

Nous pénétrons ensuite dans une grande salle qui a une magnifique vue sur les Alpes et le Mont Blanc. Cette salle comprenait à l’époque de Voltaire deux pièces : la salle à manger et le bureau-bibliothèque. Actuellement une maquette et une table multimédia présentent le domaine de Ferney à cette époque ainsi qu’un certain nombre d’illustres visiteurs qui y séjournèrent. Quelques livres évoquent sa bibliothèque qui comprenait 7.000 ouvrages. Ceux-ci ont été achetés à sa mort par l’impératrice Catherine II de Russie (1762-1796) avec laquelle le philosophe avait des échanges épistolaires importants et sont conservés aujourd’hui en Russie.