En plein cœur de la plaine Monceau dans le 17ème arrondissement de Paris, quartier à la mode au XIXe siècle, le magnifique hôtel particulier qui abrite aujourd’hui le musée national Jean-Jacques Henner est un témoignage de l’émulation artistique et culturelle de ce quartier dans lequel beaucoup d’artistes se sont installés à cette époque. Grâce à une rénovation complète et très réussie qui vient de s’achever, cet hôtel a retrouvé l’aspect, le charme et l’atmosphère du XIXe siècle. C’est un des rares exemples qui reste de l’architecture privée sous la IIIe République (1870-1940).
Le musée présente sur quatre étages la vie et le parcours artistique du peintre Jean-Jacques Henner (1829-1905). Considéré à son époque comme un des plus grands artistes de son temps, il est surtout connu aujourd’hui pour la représentation de nus féminins à la chevelure rousse et aux chairs pâles dans un paysage sombre.
▲Jean-Jacques Henner
Autoportrait, 1877
huile sur toile, H. 46cm, l. 38,5cm
© RMN-Grand Palais /Franck Raux.
Bien que celui-ci soit familier de ce quartier et de ses habitants, il n’a jamais vécu dans cet hôtel. Des lettres conservées au musée attestent qu’il y a été invité à plusieurs reprises par le peintre Guillaume Dubufe (1853-1909), son propriétaire depuis 1878 dont c’était la demeure et l’atelier. Conçu par l’architecte Nicolas Félix Escalier (1843-1920) et réalisé entre 1876 et 1878, le bâtiment connait au fil du temps cinq phases d’aménagement successives. Déjà, Dubufe le fait surélever pour y aménager deux grands ateliers d’artistes orientés au nord pour bénéficier d’une meilleure lumière et donnant sur l’avenue de Villiers. En 1935, il est à nouveau surélevé de deux étages. Celui-ci est l’exemple même de la variété de styles que l’on appréciait et qui fait référence à des époques et civilisations différentes. Avec un mélange de briques et de pierres, la façade sur l’avenue de Villiers s’inspire du style ≪Louis XIII≫. Quant à la fenêtre à meneaux, elle rappelle le style ≪Renaissance≫. Sur les grilles des portes d’entrée ont été rajoutées les initiales ≪JJH≫ et sur la façade, on trouve une fonte du buste de Jean-Jacques Henner par son ami Paul Dubois (1829-1905). En 1921, Marie Henner (1858-1942), nièce par alliance de l’artiste, achète l’hôtel particulier pour y créer un musée dédié à l’œuvre de son oncle qui ouvre en 1923. Puis, elle le lèguera à l’Etat avec les meubles, de nombreux documents et surtout quatre cent quarante peintures dont trois cents sont actuellement exposées.
▲Rome, terrasse de la villa médicis, 1860
huile sur toile, H. 59cm, l. 115cm
© RMN-Grand Palais /Franck Raux.
Né en Alsace dans une famille de cultivateurs, Jean-Jacques Henner commence sa formation de peintre au collège d’Altkirch puis à Strasbourg. De 1846 à 1855, ayant obtenu une bourse, il poursuit ses études à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris puis dans les ateliers des peintres Michel-Martin Drolling (1786-1851) et François-Edouard Picot (1786-1868). En 1858, il remporte le grand prix de Rome de peinture avec un sujet inspiré de la Bible. Pendant son séjour de cinq années à la Villa Médicis, il visite l’Italie : tout d’abord en 1860, Florence et l’Ombrie puis en 1862 et en 1864, ce sera Naples et sa région.
De retour à Paris en 1867, il emménage dans un atelier au 11 place Pigalle. En 1871, l’Empire allemand annexe l’Alsace et Henner choisit la nationalité française tout en gardant des liens avec sa région d’origine dans laquelle il retournera chaque année. De 1874 à 1889, il crée avec Carolus-Duran (1837-1917) ≪l’atelier des Dames≫ destiné comme son nom l’indique aux femmes qui n’avaient pas le droit de suivre les cours de l’Ecole des Beaux-Arts. Couvert d’honneurs, membre de l’Institut en 1889, médaillé du Salon où il expose chaque année, il cumule les commandes de portraits. De plus certaines de ses œuvres sont achetées par l’Etat et dès le lendemain de sa mort, le Petit Palais lui consacre une salle.
Le musée national Jean Jacques Henner met en exergue la carrière et le travail en atelier de ce grand artiste représentatif de la peinture officielle du XIXe siècle.