Depuis 1973, la maison de l'artiste est ouverte au public. Etant restée telle que l'écrivain l'avait laissée avec son décor luxueux et tous ses nombreux souvenirs, elle ne peut se visiter qu'en compagnie d'un guide et avec réservation préalable.

En commençant par les salons bourgeois, nous sommes surpris par tant de classicisme, voire de sévérité. Tout d'abord, le salon rouge, pièce centrale de la maison, qui a conservé l'atmosphère des intérieurs du XIXe siècle avec, aux murs, ses portraits de famille, peints par la sœur de l'artiste. Deux portraits de l'écrivain par Edmond de Pury (1845-1911) attirent le regard car ils présentent deux aspects de la personnalité de Pierre Loti : l'un en uniforme de lieutenant de vaisseau très digne et l'autre en fier guerrier ottoman. Ensuite nous passons au salon bleu, décoré dans le style classique du XVIIIe siècle, selon le goût de sa femme, issue de l'aristocratie bordelaise.

Mais l'originalité de cette maison se trouve dans les salles suivantes avec leur luxe et leur richesse. Nous quittons la réalité pour rentrer dans le monde du rêve. L'écrivain aimait la vie de château et les lieux décorés. Il reconstitua, avec la salle Renaissance, une salle de réception de château avec ses cinq tapisseries flamandes du XVIIe siècle, issues de la tenture de l'Histoire de Constantin d'après des cartons de Rubens (1577-1640). Cette pièce est impressionnante tant par sa taille (elle occupe deux étages du bâtiment) que par son décor fantaisiste. La cheminée, dessinée par Loti lui-même, de style Louis XV-Louis XVI occupe une place importante. Sur les vitraux de la grande verrière, on peut voir un blason authentique -celui de la famille noble de sa femme- et un blason original que l'écrivain s'est inventé. Pour donner une perspective à cette pièce, il aménagea un majestueux escalier qui servit de scène de théâtre lors des fameuses fêtes qu'il aimait organiser.

Ce dernier mène à la salle gothique dont le décor évoque le Moyen Âge, à la mode dans la seconde moitié du XIXe siècle, avec ses stalles en bois, son plafond à caissons, ses bannières fichées dans les murs, et sa très grande cheminée. On s'étonne également que les ouvertures de style gothique flamboyant soient montées à l'envers, ce qui montre que Loti n'était pas attaché à l'authenticité mais qu'il cherchait surtout à donner une impression. Cette salle fut inaugurée en 1888, lors d'un somptueux dîner Louis XI où les domestiques et les invités partaient tous des vêtements moyenâgeux. Les invitations et le menu étaient écrits en vieux français, la vaisselle était appropriée : drageoirs, aiguières et coupes.